LA MONOMANE DE L’ENVIE DE GÉRICAULT
Au début, elle était une belle jeune fille intelligente. Elle avait une famille, elle n’était pas pauvre et elle était heureuse.
Mais un évènement tragique allait perturber à jamais sa vie : elle perdit sa famille dans un accident d’avion. Elle devint malheureuse et mauvaise : elle se mit à envier le bonheur de ces concitoyens.
Alors une transformation physique s’opéra. Ses beaux cheveux bruns devinrent gris, ses habits se changèrent en haillons, et ses yeux, qui autrefois reflétaient le bonheur, la joie et l’insouciance, se mirent à exprimer l’envie à l’état pur. Son front se plissa de rides et son visage se couvrit de tâches de vieillesse. Des cernes apparurent sous ses deux billes noires qui lui servaient d’yeux, et sa bouche se tordit en un rictus effrayant.
Pour cacher ses cheveux rêches et gris, elle portait un couvre-chef. Son aspect terrifiait tellement les habitants de son village, elle qui jadis avait été aimée de ses voisins, qu’ils décidèrent de l’exclure de la société. Ils l’isolèrent dans une cabane au fin fond de la forêt qui bordait le village. Et aujourd’hui encore, dans sa cabane, assise sur une chaise, le dos courbé, le visage tourné vers la fenêtre, elle pense, le regard perdu dans le vide, au bon vieux temps, et son visage exprime une seule et unique expression : l’envie.
Cet unique défaut l’avait conduite à sa perte.
Namori