Le poids de l'imprudence
Cela sourdait autour de moi mais aussi en moi : le ciel, mon cœur, le vent, la nature, mes pensées, les gens … tous vibraient de cette énergie que l’on nomme le printemps, tous amoureux de la vie. Je me baladais le cœur chantant, mes bras chasseraient l’air tiède comme les ailes d’un moulin; et même mes pieds dansaient. Ils évoluaient chacun de leur côté avec fantaisie sans se soucier où l’autre poserait l’appui ; ils sautillaient, gambadaient… La brise s’engouffrait dans mon corps par ma bouche avide, il exultait de joie et de légèreté. Enivrée je me mis à courir, espérant m’envoler d’un moment à l’autre en criant « youpi ! ». Et, voilà qu’au bord du ruisseau, les galets humides, et …. Vlan ! Malgré mes bras battant l’air comme un véritable oiseau, je ne pus maîtriser mon envolée et me suis retrouvée très rapidement le cul dans l’eau au milieu du ruisseau. J’ai dû faire des efforts énormes pour sortir mes bottes ancrées dans la vase. Trempée de la tête aux pieds, je rentrais penaude par le chemin le moins fréquenté, tout en pensant à mon imprudente euphorie saisonnière. J’entendais le croassement de mes pieds dans les bottes mouillées, et me mis à rire en revoyant la scène de ma chute ; car en réalité je devais être bien plus lourde que dans mon rêve ! Depuis, j’aime le poids de ce corps qui m’a fait chuter, car à chaque fois que j’y repense, je ris.